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le Patriote (hebdo du PCF-06) 5 mars


ALTERNATIVE : D'AUTRES PRATIQUES POUR UN AUTRE CONTENU


La mobilisation non négligeable, mais pour l'instant insuffisante contre l'inacceptable CPE, renforce le sentiment déjà éprouvé lors de précédents rendez-vous militants, en particulier le 2 février : décidément, nos ripostes ne sont pas encore à la hauteur des coups portés. En conséquence, se renforce l'impression que cette droite quasi-vichyste avance à la manière d'un bulldozer, faisant fi de l'impopularité des mesures prises et de l'expression du suffrage universel (régionales 2004, référendum 2005). Colère, rage, mais aussi résignation et désespoir : tout cela existe autour de nous, en particulier dans le monde du travail et dans les quartiers populaires. Prêtons attention au sentiment d'impuissance, malgré les quelques succès partiels et surtout le formidable résultat du 29 mai 2005, sentiment qui aggrave la crise de la politique et de sa représentation, dont le populisme du FN et de l'UMP se nourrissent tout en l'alimentant en permanence.

Dans un tel contexte marqué par un attentisme du mouvement social faute de perspectives politiques claires, grandes sont les responsabilités des militant-e-s du non de gauche le 29 mai 2005. Mais à ce jour qu'avons-nous fait ensemble de ce formidable succès ? Déjà l'an dernier posait problème le fait de favoriser à Nice, comme l'a fait le PCF, sa propre campagne plutôt que de s'atteler à la construction et à l'animation communes des comités du "Non de gauche", choix qu'ont fait par contre Alternatifs et LCR. Et depuis, les comités du "Non de gauche" dans notre ville n'ont pu trouver de second souffle.

Plus grave : la tentation existe au sein du PCF comme de la LCR de faire cavalier seul aux prochaines élections présidentielles, dans la perspective d'une affirmation partidaire et dans l'espoir du ralliement autour de leur candidat de l'ensemble des sensibilités du "Non de gauche". Ce scénario catastrophe doit être évité à tout prix car il ruinerait les espoirs nés du 29 mai et des pratiques unitaires exemplaires expérimentées ailleurs dans le département (dans les vallées, à Grasse ou à Gattières par exemple) ou dans la région (dans les Bouches-du-Rhône), pratiques qui ont puissamment contribué à la victoire.

Rappelons que ces pratiques unitaires sans hiérarchie (et sans mise au pied du mur des uns par les aurtres), déjà à l'oeuvre dans le mouvement altermondialiste et dans les mouvements sociaux, sont à la base des succès de l'altermondialisme, ce nouveau mouvement d'émancipation auquel participent sur des bases égalitaires des hommes et des femmes aux engagements les plus divers (associatifs, syndicalistes, politiques)

C'est avec ces pratiques que nous devons renouer de toute urgence, en les raccordant à la méthode nécessaire à l'élaboration d'un projet alternatif. En effet, les échecs stratégiques de toutes les écoles du mouvement ouvrier (extrême-gauche comprise) pour changer la société nous amènent à penser que personne ne détient à lui-seul les clés de ce travail d'élaboration. Et ce travail d'élaboration ne peut être limité à des réflexions d'état-major : il doit associer le plus grand nombre de citoyennes et de citoyens comme on avait commencé à le faire dans la campagne référendaire.

Si nous savons nous y prendre ainsi, alors nous éviterons le choc des concurrences stériles au moment des prochaines échéances électorales et nous pourrons mettre le débat sur le projet et donc sur le contenu de l'alternative au centre. Pas de prélable donc. Se rassembler et inventer les cadres adéquats pour ce faire ; participer à un travail d'élaboration : voilà des objectifs parfaitement complémentaires.

C'est en s'appuyant sur cette méthode que pourra se construire l'unité la plus large pour battre la droite et l'extrême-droite et ouvrir le chemin d'une alternative. Indispensable, une majorité sociale pour le changement ne peut faire l'économie d'un débat avec le PS et cette partie de la gauche qui s'est fourvoyée en votant "oui" le 29 mai, en établissant le rapport de forces nécessaire pour que dans ce débat, les partisans de l'alternative porteuse d'espoir aient gain de cause sur les défenseurs d'une alternance qui a amené la catastrophe du 21 avril.

L'unité des partisans du "Non de gauche" à l'occasion des prochains rendez-vous électoraux -en particulier au premier tour- est indispensable pour peser dans ce sens. Et cette méthode citoyenne et altermondialiste, nous pouvons la mettre en oeuvre sans attendre : c'est le sens de l'appel pour des candidatures unitaires en 2007 et 2008. Un projet d'abord, une équipe pluraliste et représentative de toutes les sensibilités ensuite, une candidature enfin : voilà la feuille de route pour réussir en 2007.

Un contenu de rupture avec les politiques libérales, certes : les bases communes existent et ce qui est en question et qui sépare les uns les autres doit être débattu avec le plus grand nombre. Réforme radicale des institutions et mise en place d'une véritable démocratie active ; aides publiques pour la reconversion des productions polluantes et militaires en productions civiles et d'utilité sociale et écologiques, mais aussi pour aider les expériences autogestionnaires de remise en route des entreprises par les salarié-e-s refusant licenciements et liquidations ; extension et démocratisation autogestionnaire des services publics ; affirmation non pas de l'égalité des chances mais de l'égalité des droits dans les politiques publiques et dans la vie de la cité, y compris par le droit de vote de tou-te-s à toute élection : voilà entre-autres quelques pistes de travail à l'échelle du pays comme à celle de l'Europe. Des pistes qui permettront d'élaborer un projet politique porteur d'une autre politique sociale, mais qui ne soit pas simplement l'addition des revendications, parfaitement légitimes, du mouvement social. Pour les Alternatifs, l'élaboration de ce projet doit se faire sans précipitation mais sans retard, en pratiquant la démocratie participative, seule garante d'un contenu à la hauteur de l'espoir né le 29 mai.

Débattons-en toutes et tous ensemble !



Romain Testoris et Bruno Della Sudda, militants Alternatifs

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