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Assemblée générale de rentrée du Front de Gauche du 6 septembre

Quelles stratégies pour transformer la société ? Quel rôle pour le Front de Gauche ?

par Arthur Leduc - Les Alternatifs

Samedi 6 septembre le Front de Gauche s’est réuni lors d’une « assemblée de rentrée » à la mairie de Montreuil. Il s’agissait de faire le bilan de la séquence politique qui s’était achevée avec les élections européennes et de débattre de la situation politique actuelle et des perspectives pour le FdG. Cette réunion a été l’occasion de renouer le dialogue après une période de tensions entre le PCF et le PG à l’occasion des élections municipales (en partie à cause des alliances locales du PCF avec le PS à l’image de Paris). C’est ainsi qu’environ 200 personnes -représentant-e-s des organisations politiques qui composent le FdG, « personnalités » du monde associatif et syndical, représentant-e-s des FdG locaux et des Fronts thématiques et citoyen-ne-s- ont pu débattre sereinement des perspectives pour le FdG. Il ne s’agissait pas décider de son avenir, dans une assemblée qui n’a pas été mandatée pour cela, mais de mettre sur la table les points d’accord et de désaccord afin de lancer des débats essentiels pour cet avenir.


Notons tout de suite les limites du format de cette réunion, longue suite d’interventions en plénière (une centaine de personnes sont intervenues tout au long des 6h de débats), sans de vrai moment de mutualisation de la réflexion ou de forme de débat plus ouvert. Une intervenante a d’ailleurs parfaitement exprimé que ce type de format ne favorisait pas du tout la participation de citoyen-ne-s peu expérimenté-e-s dans la prise de parole en public.
En positif, les débats ont permis de montrer les très larges convergences d’analyses sur la situation de crise politique majeure -marquée notamment par l’importance de l’abstention et le danger que représente le FN- et sur la caractérisation de la politique menée par le gouvernement qui chaque jour s’enfonce un peu plus, et en l’assumant, dans le néo-libéralisme et le néo-conservatisme. Un accord semble aussi se dessiner sur la question, autrefois épineuse, des adhésions directes au Front de Gauche ainsi que sur la nécessité pour les forces de la transformation de la société d’être à l’offensive dans la période actuelle.
Mais de profonds désaccords stratégiques se sont aussi exprimés durant cette réunion.
De manière synthétique, et donc un petit peu caricaturale, voici les positions qui ont émergé.

  • Pour la « minorité » de Gauche Unitaire l’objectif est de s’adresser à l’ensemble de « la Gauche » (PS compris) afin de faire émerger une improbable « majorité rose-rouge-verte ».
  • Pour le PCF, l’urgent est de travailler sur le projet et non pas de se focaliser sur les questions d’autonomie vis-à-vis du PS. On pourra tout à fait apprécier l’accent mis sur la question du projet, mais ce positionnement ne lève pas les ambiguïtés vis-à-vis du PS, ambiguïtés qui pourraient -il s’agit ici davantage d’une hypothèse que d’une certitude- se poser de manière aiguë dans quelques mois lors de prochaines échéances électorales. Le refus de prendre une position claire reste donc un problème pour le FdG : on ne sait toujours pas si pour le PCF, il faut discuter avec le PS ou avec la gauche du PS qui exprime un certain refus de l’austérité.
  • Le PG a exprimé lors de cette réunion, et avec une très grand cohérence, un tournant stratégique important : les partis politiques sont discrédités et la crise de la politique est telle que le clivage gauche/droite n’est plus pertinent ; il faut donc s’adresser directement au Peuple pour le mettre en mouvement et pour cela le PG a décidé de créer un « mouvement pour la VIème République » sous l’égide de Mélenchon. On sent bien ici les références aux processus progressistes d’Amérique indo-afro-latine ainsi qu’au récent mouvement Podemos en Espagne. Mais quid des mobilisations sociales de masse qui ont justement permis à ces mouvements d’émerger ? Et que deviennent les médiations politiques dans les processus de transformation de la société ? Le risque n’est-il pas, paradoxalement, de tomber à la fois dans le césarisme et dans le spontanéisme ?
  • Ensemble !, dont il faut noter l’importante participation numérique à cette réunion, a de son côté avancé plusieurs perspectives pour le FdG qui articulent le court terme et le long terme. Il s’agit notamment, dans un processus national et local, de rassembler toutes celles et ceux qui refusent la politique du gouvernement afin de faire émerger une alternative politique à gauche. C’est ce qu’Ensemble ! propose sous la forme « d’Assises contre l’austérité et pour la transformation sociale et écologique », l’idée étant notamment de s’appuyer sur le « collectif 12 avril » qui avait largement rassemblé contre l’austérité. Un élément fondamental pour le FdG est aussi la nécessité de soutenir les mobilisations sociales et les pratiques émancipatrices et alternatives présentes dans la société. C’est une nécessité pour construire un projet de transformation de la société qui rassemble largement et qui soit mobilisateur.
    Aucune de ces questions stratégiques n’a été tranchée à Montreuil. Mais pour la première fois, elles ont été posées dans toute leur acuité. Contrairement à ce que semblent indiquer certains propos des dirigeant-s-s du PG utilisant de manière appuyée le terme d’échec -ce qui est excessif-, même mal en point, le FdG n’est pas mort : c’est une certitude, et personne n’entend ou ne se risquerait à -preuve qu’il est bien vivant- l’enterrer. Pour autant, il ne sait pas vraiment où aller. Il est, à l’heure actuelle et malgré ses difficultés, l’unique cadre unitaire existant et reconnu à une échelle de masse pour une alternative de gauche au gouvernement actuel. Il a d’énormes responsabilités : avant tout celles d’être ambitieux et de faire preuve d’humilité. Ambitieux dans les perspectives qu’il se fixe, celles d’une rupture sans équivoque avec les politiques d’austérité pour une véritable transformation de la société. Humble dans son rôle : celui d’un outil politique qui ne peut ni prétendre construire seul un mouvement social de masse, ni prétendre être hégémonique dans le processus de transformation de la société. Enfin, le FdG ne peut à lui seul représenter l’ensemble du front politico-social pour une alternative à gauche : c’est pourquoi le dialogue et l’action commune doivent s’ouvrir, en ce qui concerne les forces politiques, aux dissidences du PS et d’EELV, à Nouvelle Donne, de même qu’au NPA, aux libertaires et aux écologistes radicaux. Dans ce sens, les mobilisations sociales qui émergeront dans les temps qui viennent ne manqueront pas d’être décisives. Au Front de Gauche d’y trouver sa place et d’y jouer pleinement son rôle d’outil politique.

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