Article à paraître dans Rouge et Vert
15 janvier 2010
147 salariés de l’entreprise Philips EGP de Dreux (Eure-et-Loir) ont "pris le contrôle de production" de leur usine afin de dénoncer la fermeture programmée de site en janvier par la direction.
Philips en 2000 c’était 4 000 emplois sur les trois sites
télévision de l’Eure et Loir et 1200 emplois sur le site éclairage.
Aujourd’hui c’est 217 emplois à Dreux avec la perspective d’une
fermeture complète du site dans les mois qui viennent et 500 emplois sur
le site éclairage de Chartres.
Les sites voisins d’Evreux (Eure) et de Rambouillet (Yvelines) peuvent
s’inquiéter.
Avec onze semaines de grève en 2008, du 26 mai 18 août, salariés et
militants se retrouvent dos au mur.
Après avoir dans un premier temps gagné le paiement des jours de grève, un
jugement en appel a annulé cette décision et condamne les salariés à payer
les frais des deux procédures.
Refusant les licenciements, les délégués syndicaux demandent que
l’exécution ne se fasse pas. Les délégués syndicaux se voient privés de
leur salaire pendant 8 mois.
Printemps 2009 et 1er mai rassemblement syndical départemental à Dreux :
importante manifestation avec blocage de la RN 12 .
Le 8 octobre 2009 convocation de l’ordre du jour du CE et 20 octobre
annonce des licenciements des délégués syndicaux avec la complicité de
FO de la CFE CGC et de la CFTC qui valident ces licenciements.
Puis l’inspecteur du travail et le ministère du travail entérineront les
licenciements. Les délégués useront de leur droit pour faire appel auprès
du Tribunal Administratif.
Septembre 2009 le Tribunal Administratif casse la décision du
licenciement des délégués.
En novembre 2009 organisation d’un meeting et gala de soutien à Champhol,
près de Chartres. Des travailleurs de Continental, de Molex, de Ford, de
Freescale, de Renault, de Radio France, des travailleurs sans papiers de
la région parisiennes en grève , des syndicalistes de Solidaires se
retrouvent alors pour répondre à l’appel du syndicat CGT Philips EGP
Dreux.
Commence à germer lors de ces rencontres, l’idée de travailler autrement.
En décembre 2009 les travailleurs passent à l’offensive.
Lors de leur assemblée générale du 21 décembre les travailleurs ayant
constaté la mauvaise foie et les mensonges de la direction de Phillips
(incapacité de justifier le plan de fermeture du site, refus de laisser
les experts faire leur travail, refus de répondre de manière écrite aux
questions du CCE et du CE, blocage de leur part de la procédure de
consultation),dénoncent l’attitude scandaleuse et le silence des
représentants de l’Etat.
Aucune proposition nouvelle écrite et susceptible d’être discutée au CCE
et au CE n’est faite.
Mais pourtant le jugement du Tribunal Administratif du 10 septembre ,
cassant la décision du ministère du travail qui autorisait le
licenciement de salariés protégés donne raison à ces travailleurs. Ce
même tribunal confirme la mauvaise appréciation du « périmètre » de la
société à prendre en considération « Consumerslifestyle » en l’occurrence.
La cour de cassation donne également raison aux travailleurs faisant
référence à la Jurisprudence de la cour de cassation du 23 juin 2009
identique concernant la société CALCIC SPECIALITES qui reprend les mêmes
arguments.
Face à la détermination des Philips EGP de Dreux les élus locaux (député
maire de Dreux UMP, Conseillers Généraux et maires de Vernouillet et
Luray-PS) ne prennent pas position pour exiger l’annulation du plan de
licenciement .
Au niveau départemental l’UMP, le PS et le PRG par leur silence avalisent
les licenciements. Les militants du PCF, du NPA, des Alternatifs, des
antilibéraux et des libertaires, des syndicalistes de la CGT et de la FSU
eux se mobilisent et apportent leur soutien.
Au niveau régional, aucune motion déposée à la session du Conseil
régional : pas une seule voix ne s’élève pour exiger l’annulation du plan
de licenciements.
Le mouvement se radicalise : assemblée générale, nouvelle manifestation,
blocage de la nationale et assemblées générales des travailleurs .
Durant tout le conflit les Unions Locales FO et CGT condamnaient la grève
de ces ouvriers « exclus » de la CGT. Dans la presse des pontes syndicaux
tenaient des propos diffamatoires et insultants à l’encontre des
syndicalistes CGT.
Fin décembre les travailleurs ont compris qu’ils ne pouvaient compter que
sur leur propres forces et décident de créer un Conseil Ouvrier,
émanation de l’Assemblée Générale. Ce Conseil Ouvrier rencontrera
régulièrement les organisations syndicales pour faire le point et les
tenir informées. Par ce mode de représentation ils entendent garder la
totale maîtrise de leurs actions. En cas de problème et de besoin c’est
l’Assemblée Générale des Travailleurs souveraine qui statuera et fera les
propositions. Cette Assemblée générale a donc pris le contrôle de la
production et a décidé de se constituer en Société Coopérative de
Production.
Après 5 jours de sommeil, la direction vient de se rendre compte que les
salariés avaient géré leurs achats, leur organisation de travail pour
maintenir une activité sur un mois.
Il est vrai que dans la tête de ces patrons voyous, l’idée de transférer
des stocks de production vers le site Hongrois au dépend du site de Dreux
tombaient à l’eau.
La seule réponse de la direction fut d’envoyer un huissier pour
constater « l’irrégularité du fonctionnent de production » mis en place.
Jeudi 14 janvier, à 11 heures, une manifestation de soutien est
programmée devant la préfecture d’Eure et Loir .
Cependant plusieurs questions restent réelles :
Les Alternatifs d’ Eure et Loir feront tout pour que cette expérience soit une
réussite.
Par leur singularité autogestionnaire et la relation régulière qu’ils
entretiennent avec des scops, les Alternatifs pourront également
favoriser la mise en réseau et à la mutualisation des pratiques
d’autogestion et de reprise d’entreprise par les salariés en Scop.
Pour les Alternatifs
Dominique Duplan