TRIBUNES LIBRES
     
 
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Nantes, transport aérien 3 décembre 2005

NON À L'AÉROPORT DE NOTRE DAME DES LANDES
Lettre ouverte au Président du Conseil Général


Monsieur le Président,

Nous avons été très impressionnés par le dossier « en débat » sur le projet de Notre Dame Des Landes paru dans le magazine du Conseil Général de Novembre 2005.

Le débat semble, dans la présentation qui en est faite, réduit par la place timide que vous avez bien voulu accorder à l'ACIPA, qui apparaît comme la seule opposition au projet. Nous tenons donc à vous préciser que L'ACIPA, qui constitue, comme vous l'écrivez, « la plus importante association opposée au projet » travaille de concert avec la coordination anti-aéroport qui comprend de nombreuses organisations, associatives, syndicales et politiques dont nous sommes.

Vous mettez d'ailleurs en balance les propos de l'ACIPRAN, association fraîchement arrivée à point pour les promoteurs du projet et franchement enthousiaste puisque « Cette nouvelle infrastructure permettrait une rupture dans l'évolution économique ».

Les autres articles du dossier, sans doute considérés comme objectifs, sont en réalité des simples justifications des promoteurs du projet. Si l'on passe sur les « témoignages » affligeants : « pas de grands voyages en voiture » et « aujourd'hui, les ponts sont aériens », l'article introductif et la présentation de l'histoire sont réducteurs voire mensongers.

L'article introductif présente la croissance inéluctable du transport aérien « malgré quelques ralentissements conjoncturels ». En réalité le simple examen des pièces soumises au débat public comme les différentes études prospectives du trafic, toujours revu à la baisse, montrent que l'activité est soumise à différents facteurs et la période nouvelle inaugurée tragiquement en septembre 2001 ainsi que l'augmentation structurelle du prix du Kérosène ne dégagent pas vraiment l'horizon de ce mode de transport, irremplaçable sur les longues distances mais peu pertinent sur les distances moyennes où le TGV le supplante avantageusement.

Le forcing des gestionnaires de l'aéroport de Nantes-Atlantique pour promouvoir les compagnies à bas coût est très risqué. Outre la promotion du dumping social qu'il implique, procédé peu prisé en principe par la Gauche, sans même parler des approximations en matière d'entretien et de sécurité, ces sociétés sont particulièrement sensibles au coût des carburants qui constituent déjà, au cours actuel du pétrole, 30% du prix du billet moyen, contre un peu plus de 20% pour les autres compagnies. Elles sont particulièrement fragiles comme en témoignent les faillites régulières depuis le mouvement de dérégulation sauvage du secteur. Asseoir un développement économique sur du sable ne nous semble pas très raisonnable.

Au demeurant, la soit disante saturation de l'équipement actuel, abondamment subventionnée par les collectivités territoriales, n'est pas perceptible avant 20 ans. Les 2 millions de passagers en 2005 constituent certes une augmentation du trafic mais celui-ci stagne depuis l'an 2000 et le nombre de mouvements, véritable indicateur d'une éventuelle saturation de la piste et soigneusement occulté par les gestionnaires dans leurs communiqués de victoire, est à la baisse depuis de nombreuses années, par exemple à - 13% de 2002 à 2004.

Et que dire, Monsieur le Président, du développement durable, abondamment affiché par les politiques des nos collectivités ? Le choc pétrolier de 1974 semble déjà oublié alors que toutes les prévisions situent le pic de production de pétrole d'ici 5 à 15 ans. Nous ne sommes plus, ici, dans la conjoncture mais dans le structurel.

A ce sujet, la lecture du rapport Chapulut sur la maîtrise des gaz à effet de serre de l'aviation civile est très instructive. Il précise qu'aujourd'hui déjà 2% des émissions de carbone mondiales toutes activités confondues sont dues à l'aviation civile, hors protocole de Kyoto est-il besoin de le rappeler. Les projections retenues dans ce rapport situent, en moyenne la baisse de la demande à - 23% pour un pétrole à 100$. La crise énergétique ne fait que commencer et le devoir des responsables politiques est, selon nous, d'essayer d'anticiper un autre développement économique d'utilité sociale, maîtrisé pour ses ressources, et basé sur des tendances à la relocalisation plutôt que de surfer sur une croissance optimisme de commande dans un monde totalement libéralisé et sans contrainte de protection sociale.

La conférence de Montréal sur le changement climatique vient de rappeler que « les changements climatiques constituent le pire risque écologique auquel l'humanité soit confrontée ». Les experts réunis à Exeter, en Grande-Bretagne, pour la conférence scientifique internationale sur le climat, ont pointé en février 2005 « les hausses de températures, l'élévation du niveau de la mer, la modification des écosystèmes terrestres et marins ».

Pour finir, dans votre billet, Monsieur le Président, vous comparez l'opposition à NDDL aux oppositions à l'arrivée du chemin de fer au XIXème siècle. Est il besoin de rappeler que la plate forme de Nantes-Atlantique remplit encore bien son rôle. Nous ne sommes pas plus partisan des lampes à huile que de la marine à voile, comme le disait qui vous savez, encore que… pour la marine,… Les mêmes arguments sortent parfois de la bouche des partisans du nucléaire pour imposer ces lourds héritages à nos descendants.

La capacité d'accueil de notre agglomération nantaise n'a pas été entravée par un aéroport qui deviendrait riquiqui. L'Ouest comprend plusieurs plateformes qui, le cas échéant, sont susceptibles de répondre, en réseau, à un éventuel besoin. Utilisons nos capacités de financement à des équipements plus utiles et commençons par financer les travaux d'insonorisation des logements et équipements publics que les personnes directement concernées en sud-Loire attendent depuis longtemps.

Nous vous savons soucieux de la liberté d'expression et du droit de réponse et nous ne doutons pas que vous accéderez à notre demande de publier la présente adresse à la même place dans la prochaine parution du magazine du Conseil Général.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le président, l'expression de nos sentiments respectueux.



Louisette GUIBERT Bertrand VRAIN Elu/e/s Alternatifs de la Ville de Nantes




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