Ecologie |
16 décembre 2005
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PLANETE EN ALERTE, SURCHAUFFE GENERALISEE
Entretien avec C.Ugoloni pour Rouge et Vert
La conférence de Montréal s'est terminée, la 1ère depuis l'entrée
en vigueur du protocole de Kyoto en février (avec l'adoption des règles
d'application) traitant de l'avenir de la lutte contre le réchauffement
planétaire, et notamment lorsque les premiers engagements de réduction des
gaz à effet de serre fixés par Kyoto seront venus à échéance en 2012. On
pouvait y entendre à cette occasion chez ceux qui vilipendent l'immobilisme
planétaire: «On ne peut pas toujours être spectateur de ce qui se trame au
plus haut niveau en matière d'environnement.l'alerte écologique est passée
mais rien ne se passe, comme si la croissance avait des vertus
thérapeutiques: le temps est pourtant compté !». "Changements climatiques :
la planète se rebelle" titrait Le Monde: à Montréal, des représentants
américains avaient présenté en vain une pétition signée par plus de 600 000
de leurs concitoyens devant le consulat américain, pressant les Etats-Unis
de s'engager dans la lutte contre le réchauffement climatique, et pourtant.
De catastrophes industrielles en catastrophes sanitaires, la confiance
aveugle des scientifiques et des populations dans le progrès s'érode et
ouvre un espace pour les lanceurs d'alerte. L'alerte aujourd'hui est
globale, ici en Gaule on gère les contre-effets des émissions de gaz (objets
de consumation motorisés) avec de faibles extincteurs, la crise urbaine fait
monter la température dans nos quartiers, l'alerte rouge a sonné, pourtant
les pompiers pyromanes courent toujours et le climat social se dégrade.
Des guerrilleros urbains veulent sauver les miettes de la décomposition
économique et sociale, les chercheurs volent au secours de notre
environnement meurtri.
Surchauffe populaire :
Des lanceurs de cocktail d'alerte, on en trouve dans nos banlieues et aussi
à l'échelle hexagonale avec les porteurs d'alerte. Christian Ugolini1 dans
sa dernière création audiovisuelle est allé à la rencontre des acteurs des
alertes environnementales en revenant sur les tragédies contemporaines. Et
pourtant avec l'amiante (dès 1906) et le plomb dans nos murs, ils nous
avaient prévenus !
Des profanes (Francis Doussal, agent de maîtrise, équarrisseur à Guer-56),
des scientifiques (Jacques Testart, directeur de recherche au CEA "père" de
la fécondation in vitro ; Jean Pierre Berlan, directeur de recherche à
l'INRA), des politiques (Michèle Rivasi, biologiste, députée de la Drôme de
1997 à 2002 co-fondatrice de la CRIIRAD, Corinne Lepage, avocate, ministre
de l'environnement de 1995 à 1997 présidente de CAP21) se font l'écho des
lanceurs d'alerte en déclenchant des controverses scientifiques, politiques
et juridiques. Ils envisagent d'autres perspectives à la destruction
progressive de la planète, prônant une attitude de vigilance au sein d'une
société qui met en oeuvre le principe de précaution, ce même principe porté
en grande pompe par J.Chirac via la charte de l'environnement (en grand
recul sur le droit existant) et qui nécessiterait un volontarisme politique
«surnaturel». «Le droit à l'environnement est entré dans la constitution
mais le principe de précaution est vidé de tout sens : la santé en est
exclue, pas de principe pollueur-payeur, un droit à l'information en recul
par rapport aux directives européennes en cours, la France organise des
"conférences de citoyens" mais les conclusions sont révélées à titre
consultatif. Les questions se posent en termes de gestion sociale pour nos
gouvernants car il faut rétablir la confiance entre citoyens et politiques
et scientifiques voire réhabiliter les territoires contaminés (ONG,
simulations et exercices d'alertes, responsabilisation du citoyen, l'armée
et ses pompiers arroseurs arrosés sont partout mobilisés)».
La lutte contre «la dégradation du climat ne présente que le nucléaire comme
solution» sur le plan énergétique poursuit C. Ugolini, avec la «croissance
de la Chine et de l'Inde, le protocole globalise les menaces à l'échelle
planétaire».
Itinéraire de survie :
Le lanceur d'alerte interpelle l'opinion publique, médiatise les dangers que
nous font courir les lobbies industriels (50 ans de pratiques
productivistes) et cherche l'appui de la communauté scientifique pour
corroborer ses propos. Il y a urgence car la publicité et le changement des
modes de vie et d'alimentation (surconsommation de sel et de sucre) ont eu
raison des traditions séculaires de la nutrition (et ses vertus sanitaires).
La résistance aux herbicides, la contamination des gènes et la mutation des
végétaux (moutarde sauvage par exemple) anéantissent chaque jour les
protestations individuelles malgré les efforts déployés par certains comme
Pierre Meneton, chercheur à l'INSERM et expert à l'AFSSA. «Un bol de
céréales équivaut à un bol de mer» affirme t-il, cela nous en dit long sur
les dérives de l'agro-business !
Alors que le signal d'alarme résonne, les vrombissants 4X4 prendront bientôt
le chemin de Dakar, celui du pillage des ressources et l'accélération de la
désespérance dans le Sahel ! Les professionnels de la dépollution jouent
leur image sur une course qui ternira encore plus le modèle occidentaliste,
la Françafrique a de belles routes devant elle..
Le nucléaire au nom de l'indépendance énergétique française (Cogema, Areva)
joue avec la vie de centaines de nigériens dans les poussières radio-actives
des mines d'uranium d Arlit, Monsanto a fabriqué et expérimenté l'agent
orange lors du conflit du Vietnam. Les prophètes de malheur de la
Confédération Paysanne ont du pain transgénique sur la planche, la dioxine,
les agents chimiques et bactériologiques attendent leur tour patiemment. Au
Mali, c'est d'une autre alerte dont il est question, celle de la pauvreté et
de l'exode dévastateur, celle des tragédies humaines sur l'itinéraire de
Ceuta.
Gwelan
1-« CECI N'EST PAS UNE ALERTE »
documentaire de 52 mn (Aber Images)
de Sandrine Guillot et Christian Ugolini, déserteur de l'industrie nucléaire
« silence radio » 52 mn 2001